Quels sont les traitements du cancer du col de l'utérus ?
Avant tout traitement, c’est une obligation médico-légale d’informer les patientes sur le risque d’infertilité lié au traitement et de leur proposer lorsque cela est possible une technique adaptée. Le traitement d’un cancer est de plus en plus personnalisé : pour chaque patient, il dépendra des différents éléments qui auront été recueillis lors du diagnostic et du bilan pré-thérapeutique de la maladie : la nature des cellules cancéreuses et leur grade, la localisation et le stade de la maladie.
Lorsqu’un cancer du col de l’utérus aura été diagnostiqué chez une patiente, le médecin traitant ou le gynécologue qui aura souvent fait le diagnostic adressera sa patiente à un oncologue spécialisé dans le traitement de ces cancers.
Celui-ci ne décidera pas seul du traitement le plus adapté à la patiente et à sa maladie car chaque patiente est unique. En pratique, le cas de chaque patiente sera discuté au cours d’une Réunion de Concertation Pluridisciplinaire ou RCP. Cette réunion réunit au minimum un oncologue, un radiothérapeute et un chirurgien. Un médecin anatomopathologiste ou un biologiste moléculaire peut aussi être présent pour donner leur opinion sur des cas particuliers.
Lorsqu’un traitement aura été choisi en RCP, le médecin qui prendra initialement en charge la maladie (oncologue, chirurgien ou radiothérapeute) expliquera en détail le traitement ou plus exactement le parcours thérapeutique envisagé lors d’une consultation particulière dénommée consultation d’annonce.
« Parcours thérapeutique » est effectivement un terme approprié car il va être proposé à la patiente un chemin parfois long jalonné de plusieurs étapes.
Au cours de ces étapes, il sera utilisé un ou plusieurs des cinq traitements disponibles contre les cancers du col de l’utérus : deux de ces traitements sont locorégionaux, chirurgie ou radiothérapie. Trois autres traitements sont généraux (traitements dits systémiques), chimiothérapie, thérapie ciblée ou immunothérapie.
Les traitements locorégionaux
La chirurgie est souvent le traitement initial des cancers du col de l’utérus. Le type d’intervention chirurgicale dépendra des résultats de l’ensemble des examens effectués pour établir le diagnostic et pour effectuer le bilan pré-thérapeutique. De plus, le choix final du type de chirurgie dépendra ultimement de ce que le chirurgien verra au cours de l’intervention.
Chirurgie des stades limités
La conisation
Pour les cancers de stade 1, le chirurgien effectuera une biopsie conique appelée également conisation. Celle-ci consiste à enlever un morceau de tissu en forme de cône dans le col de l’utérus.
Le point de vue de l'expert
Cette intervention se fait par les voies naturelles et sous anesthésie locorégionale ou générale selon 3 techniques différentes :
- Lors de la technique d’excision électrochirurgicale à l’anse diathermique (LEEP) , le chirurgien utilise une boucle de fil mince chauffée à l’électricité pour enlever du tissu du col de l’utérus.
- Lors de l’ excision à la lame froide , le chirurgien se sert d’un bistouri (scalpel) pour enlever du tissu du col de l’utérus
- Lors de la chirurgie au laser , le chirurgien a recours à un laser (faisceau lumineux étroit et intense) pour enlever du tissu du col de l’utérus
Le tissu enlevé du col de l’utérus sera ensuite examiné au microscope par un médecin anatomopathologiste pour déterminer si tout le tissu cancéreux a bien été retiré.
Une surveillance tous les trois mois la première année avec frottis, colposcopie et examen gynécologique sera instituée pour vérifier l’absence de récidive. Les femmes enceintes après une conisation ont un plus fort risque d’accoucher prématurément.
Pour les cancers de stades limités, le chirurgien peut également réaliser une amputation du col de l’utérus (trachélectomie). Cette opération se fait par le vagin et permet une grossesse ultérieure.
Un autre type d’intervention chirurgicale consiste en l’ablation de certains ganglions (curage ganglionnaire) et notamment du ganglion sentinelle pour déterminer s’ils sont envahis par des cellules cancéreuses. Le curage ganglionnaire est effectué le plus souvent en même temps que l’ablation de la tumeur.
Le ganglion sentinelle
Si un ganglion sentinelle est envahi, le chirurgien retirera les ganglions qui sont dans le petit bassin et le long de l’aorte (curage ganglionnaire) et l’anatomopathologiste déterminera si des ganglions ont été envahis par les cellules cancéreuses.
Le point de vue de l'expert
Les ganglions lymphatiques sont des organes du système immunitaire localisés dans l’ensemble du corps. Ils sont reliés entre eux par des vaisseaux lymphatiques . Le ganglion sentinelle est censé être le premier ganglion atteint lorsqu’il y a un envahissement des ganglions lymphatiques par les cellules cancéreuses. Il est repéré après injection d’un produit radioactif ou d’un produit fluorescent au niveau du col de l’utérus.
Chirurgie des stades avancés
Pour les cancers de stades plus avancés, des interventions chirurgicales plus larges devront être effectuées :
- La trachélectomie élargie : consiste en une ablation du col de l’utérus, du tiers supérieur du vagin, des ganglions lymphatiques et des tissus situés de part et d’autre du col de l’utérus (paramètres).
- La colpo-hystérectomie élargie : consiste en une ablation de l’utérus (hystérectomie) et des tissus environnants, de la partie supérieure du vagin et des ganglions lymphatiques.
Ces interventions chirurgicales peuvent se faire avec des techniques traditionnelles. Celles-ci nécessitent une incision sur le devant de l’abdomen (laparotomie). Cette incision peut être soit verticale au-dessous du nombril (ombilic) soit transversale au-dessus du bas ventre (pubis). Cette chirurgie peut également se faire par laparoscopie.
La laparoscopie et la laparoscopie robotisée
Le point de vue de l'expert
La laparoscopie appelée également cœlioscopie ne nécessite que de petites incisions dans l’abdomen.
Celles-ci permettent d’introduire dans l’abdomen un tube fin flexible muni d’une fibre optique ( endoscope ) pour visualiser en deux dimensions (2D) la région à opérer. Elles permettent également d’introduire de petits instruments pour retirer les zones tumorales.
Cette laparoscopie peut aussi être réalisée par un robot ( laparoscopie robotisée ). Celui-ci commande quatre bras opérateurs placés au-dessus du patient. Le chirurgien visualise les organes en haute définition (HD) et en trois dimensions (3D) et manipule les bras opérateurs avec une grande précision pour retirer les organes ciblés.
Quelle que soit la technique utilisée, l’intervention chirurgicale se fait sous anesthésie générale ou péridurale. La chirurgie robotique donne les mêmes résultats que la laparoscopie non robotisée et raccourcie la durée de l’hospitalisation.
Après l’intervention chirurgicale, le risque de récidives du cancer est déterminé pour chaque patiente et un traitement complémentaire pourra être proposé si ce risque est avéré.
Celui-ci est déterminé en fonction de différents critères comme l’âge, la nature et le grade des cellules tumorales, l’étendue de l’invasion des cellules cancéreuses au niveau du col de l’utérus ou à distance du col et la présence ou l’absence d’un envahissement des ganglions par les cellules tumorales.
La radiothérapie
Un autre traitement des cancers du col de l’utérus est la radiothérapie. Ce traitement peut être proposé comme traitement principal d’un cancer de stade 1 si la patiente ne veut pas de chirurgie. On peut aussi avoir recours à la radiothérapie après la chirurgie.
Ce traitement consiste à utiliser des rayons pour détruire les cellules cancéreuses et pour les empêcher de se multiplier. Le rythme et la durée du traitement sont déterminés par un radiothérapeute, ce spécialiste en radiothérapie.
Pour traiter les cancers du col de l’utérus, deux types de radiothérapie peuvent être utilisés : la radiothérapie externe transcutanée et la curiethérapie.
La radiothérapie externe transcutanée
La radiothérapie externe transcutanée utilise une source externe pour délivrer des rayons au niveau du petit bassin.
Le point de vue de l'expert
Lors de la radiothérapie externe , un appareil émet des radiations à travers la peau jusqu’à la tumeur et une partie du tissu qui l’entoure. Les radiations détruisent progressivement les cellules cancéreuses. Le médecins radiothérapeutes administrent les radiations sur la plus petite région possible afin de réduire les risques d’effets indésirables.
Deux techniques ont permis d’optimiser la radiothérapie externe transcutanée du cancer du col de l’utérus :
- La radiothérapie conformationnelle permet de mieux couvrir les organes cibles et de mieux épargner les organes à risque.
- La radiothérapie conformationnelle avec modulation d’intensité est une optimisation de la technique précédente. Elle permet de mieux épargner le tractus digestif lors des irradiations des cancers du col de l’utérus.
La curiethérapie
La curiethérapie utilise une source radioactive qui est placée à l’intérieur d’une cavité à proximité de la tumeur, en l’occurrence dans le vagin.
Le point de vue de l'expert
La curiethérapie est une radiothérapie interne qui consiste à implanter des matières radioactives, généralement de l’iridium 192, dans la tumeur ou à proximité.
L’élément radioactif ( source radioactive ) est diffusé par le biais d’un applicateur en plastique positionné dans l’utérus et placé contre la tumeur. La source radioactive peut aussi être envoyée dans de fins cathéters implantés dans la tumeur ou les tissus qui l’entourent.
La curiethérapie peut être utilisée seule ou en association avec une radiothérapie externe. Pour les cancers invasifs du col de l’utérus, la curiethérapie est effectuée après une radiothérapie externe ou après une radiochimiothérapie , cette association d’une chimiothérapie et d’une radiothérapie externe.
Les traitements systémiques
La chimiothérapie
La chimiothérapie peut être utilisée après la chirurgie, en particulier s’il y a des cellules cancéreuses au bord du tissu enlevé ou dans les ganglions lymphatiques. Elle est aussi utilisée en cas de récidive.
Le point de vue de l'expert
Les chimiothérapies ont pour objectif de tuer les cellules cancéreuses, quelle que soit leur localisation dans l’organisme. Elles fonctionnent en tuant toutes les cellules à renouvellement rapide comme le sont les cellules cancéreuses. Cependant, certaines cellules normales sont aussi à renouvellement rapide comme les cellules sanguines, les cellules des follicules pileux à l’origine des poils et des cheveux ou les cellules qui tapissent la cavité du tube digestif. C’est une atteinte de ces cellules normales qui peut être à l’origine des effets indésirables de certaines chimiothérapies.
Avant une chimiothérapie, des examens biologiques seront effectués pour vérifier notamment que les nombres de globules rouges (chargés du transport de l’oxygène aux différents tissus), de globules blancs (chargés des défenses immunitaires) et de plaquettes (chargées de la coagulation du sang) sont normaux. En effet, l’un ou plusieurs de ces nombres peuvent baisser au cours de la chimiothérapie. Ils seront contrôlés tout au long du traitement. On vérifiera aussi l’absence d’infection et notamment d’infection dentaire.
La chimiothérapie se fait le plus souvent par association de plusieurs médicaments. En pratique, ces médicaments sont administrés en perfusion intraveineuse d’environ 3 heures. Pour faciliter ces perfusions, on implante souvent chez la patiente une chambre . Celle-ci est un petit réservoir placé sous la peau au-dessous de la clavicule. De ce réservoir part un petit tube mince et flexible ( cathéter ) qui va dans une grosse veine. Les médicaments sont injectés directement dans la chambre, ce qui est plus confortable pour la patiente que les perfusions effectuées dans une veine périphérique.
Pour traiter un cancer du col de l’utérus par chimiothérapie, le protocole de référence associe un sel de platine, le cisplatine, au paclitaxel (Taxol™ et génériques). Il comporte 4 à 6 périodes de traitements (cycles) espacés chacun de périodes de repos de trois semaines.
La chimiothérapie est souvent associée à la radiothérapie (radiochimiothérapie). Elle peut également être associée à une thérapie ciblée.
Les thérapies ciblées
Le point de vue de l'expert
Comme l’indique leur nom, les thérapies ciblées ciblent spécifiquement des molécules impliquées dans la transformation des cellules normales en cellules cancéreuses ou dans le développement des tumeurs malignes. Contrairement aux médicaments de chimiothérapie qui s’opposent globalement à la multiplication des cellules cancéreuses, les médicaments de thérapie ciblée visent les mécanismes intimes de cancérisation des cellules.
La thérapie ciblée qui est utilisée est le bevacizumab. Ce médicament cible le VEGF, un facteur de croissance des nouveaux vaisseaux. En bloquant le VEGF, le bevacizumab empêche la formation de nouveaux vaisseaux, ce qui bloque l’irrigation sanguine de la tumeur et arrête sa croissance.
Les immunothérapies par inhibiteurs de point de contrôle
Récemment, les immunothérapies font l’objet de nombreux essais cliniques. Ces immunothérapies et en particulier les immunothérapies par inhibiteurs de point de contrôle ont pour objectif de stimuler le système immunitaire afin que celui-ci élimine les cellules cancéreuses.
Le point de vue de l'expert
Le traitement de cancers par immunothérapie avec des inhibiteurs de point de contrôle est une véritable révolution dans le traitement de certains cancers dont les cancers du col de l’utérus.
Ces traitements sont basés sur les trois découvertes suivantes :
- La première est la mise en évidence de molécules particulières, les points de contrôle , qui peuvent accélérer ou ralentir le fonctionnement du système immunitaire ;
- La seconde découverte est que les cellules cancéreuses peuvent utiliser les points de contrôle qui ralentissent le fonctionnement du système immunitaire pour échapper à celui-ci. Elles utilisent notamment un point de contrôle dénommé PD-L1 . Celui-ci est présent à la surface des cellules cancéreuses. Cette molécule se lie à une autre molécule dénommée PD-1 qui est présente à la surface de globules blancs, les lymphocytes T cytotoxiques , ces cellules du système immunitaire chargées d’éliminer les cellules cancéreuses. La liaison de PD-L1 à PD-1 empêche les lymphocytes de jouer leur rôle et d’éliminer les cellules tumorales ;
- La troisième découverte est que les médicaments qui bloquent les points de contrôle PD-1 ou PD-L1 permettent de stimuler à nouveau le système immunitaire pour qu’il élimine les cellules tumorales. Ces médicaments sont des immunothérapies puisqu’ils n’éliminent pas directement les cellules cancéreuses comme le font les chimiothérapies mais stimulent le système immunitaire pour qu’il élimine les cellules cancéreuses. Ces immunothérapies seront souvent plus efficaces si les cellules cancéreuses ont de nombreuses molécules PD-L1 à leur surface.
Actuellement, le pembrolizumab qui bloque le point de contrôle PD-1 est utilisée en association avec une chimiothérapie et avec ou sans le bevacizumab pour traiter les cancers du col de l’utérus qui récidivent ou qui sont métastatiques.
Finalement, les médecins cherchent en permanence à améliorer la prise en charge des patientes avec un cancer du col de l’utérus. Pour atteindre cet objectif, ils réalisent des essais cliniques. Les patientes qui participent à ces essais bénéficient des récentes avancées de la recherche. Elles deviennent aussi de vraies partenaires des médecins qui réalisent ces essais et contribuent à la réalisation de nouveaux progrès.
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Article mis à jour le 15 avr. 2025
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